Accueil » Au Perche en Or, les athlètes visent les étoiles

C’est dans le jardin des cyclistes, au STAB vélodrome de Roubaix, que s’est tenue samedi soir la troisième édition du Perche en Or. Un événement qui réunit les meilleurs perchistes français, mais qui séduit aussi au-delà de l’Hexagone, en attirant des pointures mondiales du saut à la perche. Un cadre séduisant, pour une compétition propice à de belles batailles.

CHANGEMENT DE DÉCOR POUR LE PERCHE EN OR

Podium Perche en Or 2023
Un palmarès riche pour l’édition 2023 à Roubaix – Photo : Adrien Guillard-Dettin

Après deux premières éditions couronnées de succès à Tourcoing, le Perche en Or a dû quitter la salle Léo Lagrange. Le tout, la faute à des travaux. La deuxième étape du Perche Elite Tour s’est ainsi disputée dans un décor atypique : le vélodrome couvert de Roubaix. Ce circuit est composé de cinq étapes de saut à la perche. Présents massivement lors des précédentes éditions, les spectateurs ont quelque peu boudé l’édition roubaisienne. Pour les supporters, le STAB vélodrome présente un défaut. En effet, l’anneau de cyclisme sur piste éloigne les spectateurs de la zone de compétition.
Malgré un vélodrome à moitié rempli, les personnes présentes ont fait du bruit. De l’ambiance, il en fallait pour faire aussi bien que les deux premières éditions du Perche en Or. L’ancien recordman du monde Renaud Lavillenie et Chris Nilsen, vice-champion olympique, se sont respectivement imposés en 2021 et 2022. Respectivement, ils avaient franchit tous deux la barre mythique des 6 mètres. L’Américain Chris Nilsen n’était pas là pour défendre son titre, tout comme la Biélorusse Iryna Zhuk, exclue des compétitions internationales en sanction contre la guerre en Ukraine. Renaud Lavillenie a, lui aussi, manqué à l’appel de cette édition 2023, car il a décidé de ne pas prendre part à la saison en salle. Des absents donc, mais le spectacle, de son côté, a persisté.

SUTEJ CONTRE LES FINLANDAISES

Tina Sutej Roubaix
En patronne, la Slovène a tenu la pression dans un cadre atypique – Photo : Adrien Guillard-Dettin

Des surprises dans ce concours féminin, il y en a eu, avec l’élimination d’Angelica Moser (SUI), championne du monde junior (2016), qui ne parvient pas à franchir la barre des 4,45 m. Même sanction pour Sophie Cook. En effet, la Britannique brise sa perche et retombe sur le sol, choquée et avec une légère douleur au poignet. Elle préfère s’arrêter là. Arborant des rubans dans ses cheveux aux couleurs de l’Ukraine, Maryna Kylypko, l’une des deux Ukrainiennes de ce concours, semblait très touchée d’avoir pu concourir en France. Beaucoup d’émotions pour celles qui ont vu leur quotidien bouleversé par la guerre en Ukraine. La barre des 4,45 m fera office d’épouvantail et n’épargnera pas les Françaises. Quatre d’entre elles s’arrêteront à ce stade de la compétition.
À domicile, Alix Dehaynain se contente d’une 9place, partagée avec Elina Giallurachis. La recordwoman de France, Ninon Chapelle et la championne de France en titre, Margot Chevrier, terminent toutes deux à la 7e place du concours. Il ne reste plus qu’une tricolore, « MJ » Bonnin. La sociétaire du Stade Bordelais athlétisme pulvérise son record personnel en salle en passant la barre des 4,45m. Coupée dans sa préparation fin décembre par une blessure à la cheville, la Bordelaise se satisfait de sa quatrième place. « J’aurais pu faire un concours bien plus haut, mais on fait comme on peut », admet-elle.

Elles ne sont bientôt plus que deux, après les échecs d’Elina Lampela à 4,65 m. Dans un duel opposant Tina Sutej, la médaillée de bronze aux mondiaux en salle en 2022, et la championne d’Europe surprise, Wilma Murto, les deux protagonistes échouent par deux fois à 4,70 m. La Finlandaise, qui s’engage avant la Slovène, réussit à passer la barre lors de son dernier essai. Ainsi, elle met la pression sur Sutej qui n’a d’autres choix, pour rester en lice, de franchir, elle aussi, la barre des 4,70 m.
La pression, Tina Sutej sait la gérer, puisqu’elle franchit cette hauteur sur sa dernière tentative et reprend la tête de la compétition au nombre d’essais. Wilma Murto n’arrive pas à déloger la Slovène et doit se contenter de la deuxième place. Tina Sutej s’adjuge logiquement la victoire sur le concours féminin. « Je suis contente d’avoir gagné, c’était une belle bataille », confie la Slovène. Une nouvelle victoire en France, sur le Perche Elite Tour, après Rouen l’an dernier. « J’aime concourir ici, les Français apprécient le saut à la perche », constate-t-elle.

LA SENSATION EMIG, OBIENA NE RIGOLE PAS

Robin Emig saut à la perche
Pour cette saison, Robin Emig est ambitieux – Photo : Adrien Guillard-Dettin

Vainqueur du Star Perche à Bordeaux il y a tout juste deux semaines, Robin Emig arrive en confiance à Roubaix. Le perchiste de 21 ans compte bien poursuivre sur sa lancée. Avec une entrée de concours sans trembler à 5,25 m, Emig a de quoi espérer une belle performance. Encouragé par ses fans dans les tribunes, qui ont pour l’occasion collé des scotchs sur leur torse, de sorte à former le nom « Emig » du perchiste du Gap Hautes-Alpes Athlétisme, Robin Emig ne déçoit pas ses supporters en surpassant les barres à 5,40 et 5,55 m.
Contre-performance du côté de l’Auvergnat Valentin Lavillenie, qui quitte le concours sur trois échecs à 5,65 m. Il avait réalisé une impasse à 5,55 m. Une barre à 5,65 m, soit deux petits centimètres au-dessus du record personnel de Robin Emig. Acclamé par ses supporters, il s’élance pour son premier essai. Le Provençal s’envole, touche la barre de la poitrine, sans la faire tomber. Le perchiste de 21 ans bat son record personnel.

Ernest Obiena Roubaix
Le Philippin a mis la barre haut face aux Français au STAB Vélodrome – Photo : Adrien Guillard-Dettin

De son côté, Thibaut Collet, arrivé en forme à Roubaix, nourrit de grands espoirs à la suite de sa victoire à Reno. Aux États-Unis, il avait franchi une barre à 5,81 m. Néanmoins, son retour à la réalité en France est cinglant, avec un échec à 5,65 m et une décevante sixième place. « C’est frustrant. Il y a dix jours, je fais 5,81 m avec la manière et là, je peine à 5,65 m », reconnaît le Français. Mais le perchiste de 23 ans n’est pas inquiet. Sûr de ses forces, il compte très vite régler les choses. Un Collet peut en cacher un autre, puisque Matthieu, le grand frère, se sera fait peur tout au long du concours. Au total, il aura effectué pas moins de 14 sauts. « J’ai beaucoup sauté. J’étais en manque de repère, mais cette soirée, c’est une réussite avec des très bonnes sensations », confie-t-il.
Le Français échouera à 5,75 m, mais terminera à une belle 5e place. Lui n’a pas beaucoup sauté et n’a pas déçu, il s’agit d’Ethan Cormont. De fait, il s’arrête à 5,75 m, mais termine sur le podium du concours. « Je suis un peu déçu, j’aurais aimé faire 75 pendant la prépa, j’étais malade, donc je ne m’en sors pas trop mal », explique Cormont. Les supporters de Robin Emig auront un temps cru à un podium de leur star de 21 ans.
En effet, le Philippin Ernest Obiena a réalisé l’impasse à 5,65 m et a manqué ses deux premières tentatives à 5,75 m. Mais il réussit sa dernière tentative et reste en lice pour la victoire face à Yao Jie. Après avoir réalisé son record personnel à 5,75 m, le Chinois échoue à 5,82 m. Tandis que le troisième des derniers championnats du monde, Ernest Obiena, remporte le concours avec une barre à 5,82 m. En outre, une satisfaction pour le Philippin, le seul à avoir battu l’extraterrestre suédois « Mondo » Duplantis lors de la dernière saison.

DESTINATION PARIS 2024

Mathieu Collet Perche en Or
Le grand frère Collet, Mathieu, a réalisé une belle prestation dans le Nord – Photo : Adrien Guillard-Dettin

C’est encore relativement loin, mais Paris trotte déjà dans toutes les têtes. Sur ce long chemin qui mène les perchistes français au Stade de France, cette saison 2023 s’annonce décisive. Quand on observe le calibre de cette génération française, on peut se donner le droit de rêver. Chez les femmes, la jeunesse a des ailes dorées : Marie-Julie Bonnin (21 ans), Elina Giallurachis (21 ans), Margot Chevrier (24 ans), sans oublier la jeune maman et recordman de France, Ninon Chapelle. Ces filles-là s’entendent bien et confient se tirer vers le haut. Chez les messieurs aussi, on ne manque pas de talents : Ethan Cormont (22 ans), Thibaut et Matthieu Collet (23 et 27 ans) ou encore Valentin Lavillenie, 31 ans. D’excellents perchistes, mais qui ont du mal à succéder à la légende Renaud Lavillenie.
Aussi, cette génération tricolore manque d’un petit quelque chose pour jouer la gagne dans les compétitions internationales, se contentant bien souvent du second rideau. Après sa troisième place à 5,65 m, Ethan Cormont l’explique. « Par rapport au niveau mondial, même européen, 5.65 m, c’est un peu faible, il manque encore quelques dizaines de centimètres pour pouvoir être compétitif », confie-t-il. Avant les Jeux, il y aura d’autres grandes compétitions internationales. Entre autres, les championnats d’Europe en salle à Istanbul (TUR, 2-5 mars) et puis, en août, les championnats du monde à Budapest, en Hongrie. De fait, la génération française a de belles couleurs pour jouer devant. Il ne manque plus qu’à briser ce plafond de verre.

À Roubaix, Arnaud Fischer

(1 commentaire)

Laisser un commentaire

%d blogueurs aiment cette page :