Accueil » Carnet bleu n°3 : Le tsunami bleu a heurté de plein fouet la Nouvelle-Zélande

Les fans du ballon ovale attendaient ce moment depuis plus d’une décennie. Samedi, ils ont enfin eu satisfaction après tant d’attente : le XV de France a fait plier les All Blacks dans un Stade de France à guichets fermés pour l’occasion. Le sélectionneur néo-zélandais Ian Foster l’a souligné, il n’avait « jamais vu une ambiance comme ça ». C’est donc avec le soutien de ses supporters, mais surtout grâce à une débauche d’énergie incroyable, que l’équipe de Fabien Galthié a remporté la plus large victoire de son histoire face aux triples champions du monde, mettant ainsi fin à une série de 14 défaites d’affilée.

Le condensé du match

Après le célèbre haka d’avant match, moment toujours aussi impressionnant, autant pour l’équipe adverse que pour les supporteurs, l’équipe de France ne perd pas ses moyens et envoie d’entrée l’artillerie lourde. Sur une touche à 5 m de l’en-but adverse, celle-ci est assurée et grâce à un maul très bien maîtrise, Peato Mauvaka inscrit en force le premier essai après seulement deux minutes de jeu (7-0). La partie s’emballe assez rapidement, les All Blacks convertissant deux pénalités en l’espace de trois minutes par l’intermédiaire de Jordie Barrett (7-6). Après une percée de Damian Penaud, Romain Ntamack feinte la passe vers l’extérieur et vient aplatir le ballon pour la seconde fois en 12 minutes (14-6). Melvyn Jaminet est en grande forme, il inscrit une pénalité excentrée sur la gauche à plus de 40 m des poteaux suite à un bon contest d’Anthony Jelonch (17-6). Les Bleus poursuivent leurs efforts et sur un autre ballon porté, Mauvaka et ses avants perforent leurs homologues, le talonneur toulousain inscrit un doublé (24-6).
La première mi-temps française est idéale, on ne pouvait rêver mieux, mais la réaction des Blacks est attendue. Elle ne se fait pas attendre avec deux essais marqués entre la 47e et la 51e minute : Barrett en coin, puis le centre Rieko Ioane déchire le rideau défensif français et sprinte vers l’en-but (24-18). La menace black ne cesse de s’amplifier malgré une pénalité de Jaminet, le troisième ligne Julian Savea réduit l’écart à l’heure de jeu (27-25). Le XV de France réagit par la suite magnifiquement bien, comme en témoigne la relance de Ntamack, conclue par une pénalité et un carton jaune pour Savea, coupable d’une faute anti-jeu, laissant ses coéquipiers en infériorité numérique (30-25). Profitant d’une passe molle, Penaud flaire le coup et intercepte le ballon, il file inscrire l’essai de la délivrance (37-25). Infatigables, les Bleus vont résister les dix dernières minutes, avant que l’inévitable buteur perpignanais ne délivre la France entière en transformant une pénalité juste après la sirène (40-25). La victoire est symbolique de l’acharnement de cette jeune équipe de France qui depuis deux ans a fortement progressé. La barre des quarante points est franchie, non pas grâce à des individualités, mais grâce à un collectif rodé qui, espérons-le, poursuivra dans la lancée de ces test-matchs d’automne.

Le tournant

L’audace, le culot et surtout une vision étincelante du jeu, voilà comment résumer la relance ô combien historique de Romain Ntamack qui, parti de son en-but, ramène son équipe devant la ligne des 22 m adverses. Cette action, à montrer dans toutes les écoles de rugby, constitue le véritable tournant du match dans une période où les Bleus commençaient à douter. En effet, 63e minute, ballon par-dessus par la défense française, Ntamack à la course contourne deux défenseurs, accélère et d’une magnifique passe cachée trouve Jaminet sur l’aile, qui remet ensuite pour Antoine Dupont au soutien. Le ballon parvient ensuite sur l’autre aile et la France obtient une pénalité dans les 22 m, assortie d’un avantage numérique pendant dix minutes. En l’espace de trente secondes, l’initiative de l’ouvreur toulousain n’a pas seulement sauvé son camp, mais a relancé la machine française.

Qui sont les protagonistes ?

Répondre à cette question apparaît bien plus ardu qu’habituellement, tant la prestation collective du XV de France a émerveillé les commentateurs. Nous n’avions pas vu une équipe aussi sereine et joueuse depuis des années, et ce, face à l’équipe la plus forte du monde. En communion avec leurs supporters, Antoine Dupont et consorts ont livré une performance légendaire. La première ligne a été royale, enfonçant en mêlée les expérimentés All Blacks et rappelant ainsi la « meilleure mêlée du monde » qu’elle était dans les années 2000. La troisième ligne a plaqué à tour de bras, ralentissant ainsi les attaques néo-zélandaises. Les arrières ont proposé du jeu et face à une défense black plus fébrile que d’habitude, cela a fonctionné. On peut cependant souligner le match exceptionnel de trois joueurs.
Cinq essais en 3 matchs, ce n’est pas le bilan d’un arrière, mais du talonneur Mauvaka, doublure « officielle » de Julien Marchand en club et en sélection. Profitant d’une blessure de son camarade, il s’est distingué par sa hargne et sa détermination, illustrées par deux essais à la suite d’un ballon porté. Propre sur les touches et en mêlée, il symbolise bien le travail de l’ombre des avants, essentiel à la victoire des Bleus ce samedi. Il apparaît comme le grand gagnant de ces trois matchs et s’affirme comme un futur leader du XV de France. Ses prestations commencent à se ressembler par leur efficacité qu’on pourrait en oublier l’importance, Melvyn Jaminet semble métamorphosé depuis la tournée de juin en Australie. Indétrônable à son poste d’arrière, il est de la trempe des grands buteurs qui ont marqué l’histoire des Bleus. 8/8 face aux perches, la pureté de sa frappe et son calme à chaque moment du match ont permis aux Français de tenir à l’écart la Nouvelle-Zélande.

C’est sûrement le plus beau match de la jeune carrière de Ntamack, et elle restera dans les mémoires pour l’éternité. L’ouvreur toulousain, auteur d’un essai, a surtout marqué la planète rugby par sa relance instinctive qui a fait gagner 80 m à son équipe. On l’attendait sur des efforts défensifs, mais c’est offensivement qu’il s’est illustré en faisant toujours avancer ses coéquipiers. Romain ne marche pas seulement dans les traces de son père, il se fraye son propre chemin en équipe de France.

Sept victoires en 11 matchs, dont une de prestige face aux All Blacks, le bilan annuel des Bleus est plus que réjouissant. À deux ans d’une entrée en Coupe du Monde face à ces mêmes adversaires, cette partie remportée permet aux Français de montrer leur ambition et de prendre possiblement un ascendant psychologique. Le vivier de joueurs utilisé par Fabien Galthié et le talent collectif de cette équipe laissent présager de bonnes nouvelles pour l’année prochaine. Le XV de France partira en effet favori du prochain tournoi des Six Nations en février, à eux d’assumer leur rôle et de faire vibrer les supporters.

Crédits photos : Le Parisien, Europe 1, Le Figaro et Rugbyrama

Germain Davila-Cristin – 23 novembre

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