Après un succès retentissant à Murrayfield, les Bleus ont conforté leur étiquette de favoris à la victoire finale. Trente-quatre points inscrits en moyenne, deux bonus offensifs glanés et une solidité défensive qui semble inébranlable. Le groupe de Fabien Galthié poursuivait son long périple et la prochaine destination n’était autre que le Pays de Galles. Victorieux lors des trois dernières rencontres les opposant au XV du Poireau, les Tricolores se déplaçaient en l’absence de Romain Taofifenua et Damian Penaud, tous deux touchés par la Covid. Humiliés à Dublin en ouverture du tournoi, les Gallois, quant à eux, récupéraient progressivement leurs cadres et ne comptaient pas s’incliner dans l’atmosphère étouffante du Millenium de Cardiff.
LE FIL DU MATCH

Le coup d’envoi donné par Romain Ntamack ne s’est pas suivi d’une période d’observation, ou de longs échanges de jeu au pied. Non, les acteurs du choc opposant Gallois et Tricolores n’ont pas ménagé leurs efforts et se sont immédiatement mis au diapason afin d’obtenir un succès tant recherché. En guise de prélude, les coéquipiers d’Antoine Dupont surpassent les clameurs de l’antre galloise et entament une phase très rude dans le camp adverse. Les Bleus parviennent à alterner entre défi physique synonyme de jeu à une ou zéro passe et l’exploitation de la largeur en écartant rapidement les ballons jusqu’aux ailes.
Ils sont récompensés, puisque Melvin Jaminet ouvre la marque dès la deuxième minute (0-3). Les temps de jeu s’enchaînent et après un gros travail des avants, les ballons sortent rapidement. Yoram Moefana vient apporter le surnombre sur la ligne bleue, une action à montrer dans les écoles de rugby. En effet, très rapidement, chaque joueur va fixer son vis-à-vis et transmettre à son partenaire. En bout de ligne, c’est finalement Jaminet qui va parfaitement fixer Liam Williams et servir sur un plateau son futur coéquipier en club, Anthony Jelonch. L’entame de match est réussie par les hommes de Galthié qui mènent 10 à 3 en l’espace de dix minutes. En l’absence du légendaire Alun Wyn Jones, c’est l’ouvreur Dan Biggar qui a hérité du capitanat pour le tournoi. Le numéro 10 gallois montre la voie à ses partenaires, comme lors de la réception de l’Écosse. Il ne cesse de monter des chandelles afin de déstabiliser la défense française, occupe parfaitement le terrain en réalisant notamment plusieurs 50-22 (un coup de pied offensif, si celui-ci est frappé depuis son camp et qu’il parvient à franchir la ligne de touche indirectement dans les 22 mètres adverses, alors l’auteur du coup de pied récupère le lancer en touche). Enfin, il relance progressivement le peuple gallois en passant deux pénalités faisant ainsi passer la marque à 9-10.
Au retour des vestiaires, les intentions sont inchangées. Si Jaminet passe une pénalité qui donne trois points supplémentaires, le match est toujours âprement disputé. Les deux paires de centres paraissent infranchissables, tandis que les avants livrent de rudes combats dans les rucks. Julien Marchand a encore impressionné pour ralentir et contester tous les ballons adverses, alors que Paul Willemse a distribué des plaquages pendant 80 minutes avec une facilité déconcertante.
Finalement, la ligne d’en-but bleue reste infranchie, malgré l’énorme opportunité de Jonathan Davies peu après l’heure de jeu. Tel un roseau, les Tricolores ont plié face aux attaques incessantes galloises, sans jamais rompre, pour le plus grand bonheur du peuple français. Les finisseurs, entrés très tôt, ont permis aux Bleus de ne jamais céder. Finalement, suite à ce terrible bras de fer, Peato Mauvaka, en reprenant le poste de son partenaire, a repris sa tâche et vient délivrer le groupe bleu en récupérant l’ultime ballon à la sirène. Score final : 9-13.
LE TOURNANT DE LA RENCONTRE

Très fermée dans le jeu offensif, cette rencontre avait quelque peu des airs de phases finales de Coupe du Monde. Il s’agit du type de match qui se gagne au mental, et cette équipe de France a su prouver une fois de plus qu’elle en avait les ressources ainsi que l’état d’esprit dans ces conditions. Le XV tricolore a certes plié, mais n’a pas craqué, notamment grâce à des capacités défensives exceptionnelles. Le travail de Shaun Edwards, entraîneur de la défense française, est d’ailleurs à souligner, tant la progression des Bleus rend admiratifs les experts du monde entier.
La rencontre fut particulièrement serrée tout le long, mais le Pays de Galles n’a jamais été capable de mettre en difficulté les Bleus. En effet, les hommes de Fabien Galthié n’ont encaissé aucun essai. Encore plus marquant : ils n’ont jamais été menés durant le match. Le XV du Coq n’a presque pas tremblé, sauf peut-être à l’heure de jeu sur la seule occasion adverse, avec l’en-avant de Jonathan Davies suite au coup de pied de Dan Biggar. En seconde mi-temps, l’attaque galloise a été stérile puisque le XV du Poireau n’a pas marqué le moindre point face à la solidarité défensive française. La force bleue a donc annihilé des Gallois qui n’ont pas semblé être en mesure de surmonter la maîtrise des Français. Plus qu’un tournant, l’élément déterminant qui a permis la victoire restera la défense tricolore.
LES PROTAGONISTES

Avec une défense de fer, Paul Willemse a pu démontrer toute sa puissance. Le deuxième ligne montpelliérain a tenu son rang 80 minutes, et s’est distingué avec d’énormes charges, faisant reculer les attaques galloises. Auteur de 13 plaquages monstrueux (plus gros total derrière François Cros, 14), à l’image d’un stop énorme sur une relance de Liam Williams, refoulé avec l’aide de Jonathan Danty. En parlant de Danty, le Rochelais a, lui aussi, repoussé les vagues galloises avec son intensité habituelle. Le centre a une nouvelle fois été utilisé dans un rôle de fixateur percutant, ce qui a mystifié la défense adverse. Son grattage à trois minutes de la fin de la rencontre a été décisif et partiellement responsable de la victoire des Tricolores.
François Cros, l’homme de l’ombre du paquet d’avants, n’a quant à lui pas déçu. Le toulousain, fer de lance de la défense française, a été rugueux dans l’exercice et son apport fut indispensable. Alors que ce domaine de la conquête des Bleus a longtemps été mis à mal, le troisième ligne s’est même révélée comme une solution en touche en fin de rencontre.
Côté gallois, Dan Biggard a permis à son équipe de coller au score durant tout le match et d’entretenir l’espoir. Ses coups de pieds variés, entre chandelles dangereuses et jeu d’occupation, ont déstabilisé les Bleus. Le capitaine gallois a d’ailleurs trouvé ce qu’on appelle un « 50-22 » à deux reprises, ce qui a maintenu la pression dans le camp français.
Avec ses quatre succès en autant de rencontres dans le Tournoi, le XV de France s’offre ainsi le droit de rêver à une victoire finale. Les Bleus ont su rester pragmatiques et leur défense impériale a été la clé de cette réussite. Les Tricolores joueront la gagne samedi face aux Anglais dans un Crunch qui s’annonce particulièrement captivant. Les hommes de Fabien Galthié tenteront dans le même temps de réaliser le Grand Chelem, exploit qu’ils n’ont pas réalisé depuis douze ans.
Crédits photos : Rugbyrama, RMC Sport, Dico du Sport et Actu.fr