Accueil » En attendant… Can Akkuzu

Il est ancien champion de France et a déjà connu le village olympique. Pourtant, sa soif de réussite ne faiblit pas. Évoluant actuellement en Bundesliga au TTF Liebherr Ochsenhausen, Can Akkuzu poursuit son ascension pongistique. En ligne de mire, les championnats d’Europe avant Paris 2024. Entretien.

Formé dès son plus jeune âge à Haguenau, sous la houlette de son père, Can Akkuzu est devenu très rapidement un mordu du tennis de table. Le jeune prodige grandit et développe rapidement un jeu “offensif”. Un style élégant lui permettant d’atteindre la finale des championnats de France en 2019, remportée face à Antoine Hachard. Avec humilité, le jeune pongiste revient sur cet évènement et se livre également sur les prochaines échéances, dont les championnats d’Europe 2023 qui auront lieu en Suède.

Si tu devais te décrire (pongistiquement) en quelques mots… 

Can Akkuzu : Je dirais que j’ai un jeu agressif et offensif. 

Comment as-tu débuté le tennis de table et pourquoi ce sport et pas un autre ? 

C.A : Au début, je faisais du football et du basket-ball. Mon père faisait du tennis de table et m’a amené une fois à la salle pendant les vacances d’hiver, lorsque je ne pouvais pas faire de foot. J’ai commencé à faire un entraînement et l’entraîneur du club m’a tout de suite détecté. Puis, j’ai commencé par un entrainement par semaine. Puis deux, trois, etc. Sans jamais vraiment m’arrêter.

Très vite dans les catégories jeunes, tu as explosé avec de bons résultats. Comment as-tu vécu ça, avec certainement beaucoup de pression ? 

C.A : J’étais dans les meilleurs joueurs européens, mais c’était assez naturel. Dans le sens où la France dominait vraiment dans les catégories jeunes et j’avais juste l’impression de suivre un processus. Il y avait forcément beaucoup de pression, mais c’était je me disais simplement “joues ton jeu”. Lorsque tu vas à Nantes, tu joues pour gagner les Europes. En fait, l’entraîneur te conditionne pour cela. 

Can Akkuzu équipe de France
Champion de France en 2019, Can Akkuzu incarne la relève du tennis de table français – Photo : Rémy Gros

À l’âge de 13 ans, tu pars à Nantes. Comment vis-tu cet éloignement avec ta famille ? 

C.A : En ce qui me concerne, je l’ai plutôt bien vécu, puisque j’avais l’habitude de partir en compétition. L’année avant mon départ, je dormais la semaine à Strasbourg. Pour moi, ça allait. J’étais avec plein d’amis, je faisais du tennis de table et, cela peut paraître bizarre, mais ça me semblait normal. Je savais que si je voulais être dans les meilleurs, ce que je voulais depuis toujours, il fallait passer par là. C’était plus pour mes parents que la situation était difficile. 

Ensuite, tu prends la direction de l’Allemagne. Quelles sont les différences entre les championnats français et allemands ? 

C.A : La différence, c’est qu’en Allemagne, il faut toujours faire ses preuves. En France, les joueurs français ont largement leur place. Alors qu’en Allemagne, lorsque les clubs te veulent, c’est que tu comptes beaucoup pour eux et ils croient en nous pour gagner les matchs. Je pense qu’il y a un petit peu plus d’exigence en Allemagne par rapport aux résultats. 

Là-bas (à Ochsenhausen), tu as très vite eu l’occasion de jouer avec Simon Gauzy. Qu’est-ce que t’as apporté ce type d’oppositions ? 

C.A : C’est vrai que lorsque je jouais là-bas, avec les deux joueurs phares que sont Simon Gauzy et Hugo Calderano (NDLR : n°5 mondial), je me donnais à 200 %. Même quand j’avais l’impression d’être à fond, il fallait que je donne encore plus. Ces entraînements m’obligeaient à me dépasser. J’étais au quotidien avec des gens qui étaient très forts, et je pouvais voir ce qu’était le quotidien d’un joueur du Top 10 mondial. Cela m’a beaucoup aidé dans ma progression.

Akkuzu Bleus
Can Akkuzu évolue en Première Bundesliga (Allemagne), sa deuxième saison dans ce championnat réputé – Photo : Rémy Gros

” La différence, c’est qu’en Allemagne, il faut toujours faire ses preuves”

Can Akkuzu

Qu’est ce que t’as apporté ton titre de champion de France en 2019 et qu’est-ce qui a changé pour toi ? 

C.A : Déjà, de la satisfaction et une joie énorme pour moi et ma famille. Mais ensuite, ce titre ne m’a pas apporté ce que j’aurais aimé que ça m’apporte. J’aurais aimé surfer sur ce résultat, mais ça n’a pas été le cas. J’ai quand même appris qu’il fallait suivre son chemin, peu importe le classement, la forme et le résultat. J’ai compris que le plus important était d’avoir un processus précis à l’entraînement : mental, technique et physique. J’étais champion de France, j’ai vite pensé que je serais Top 40 ou 50 mondial, mais ce ne sont pas des choses très concrètes. Ce qu’il faut, c’est progresser.

Qu’est-ce qui t’as manqué à ce moment-là pour surfer sur ta dynamique ? 

C.A : Peut être que j’ai manqué de naturel. Quand j’étais petit, je n’aurais jamais imaginé que je serais champion de France. J’ai compris qu’il fallait revenir sur les fondamentaux et qu’il fallait, tous les jours, travailler ses points forts et ses points faibles. Ce sont des choses que je n’ai pas tout le temps fait, j’ai grillé des étapes après mon titre.

En 2021, tu étais remplaçant aux Jeux Olympiques de Tokyo. Comment as-tu vécu cette compétition et cette première ? 

C.A : Je n’ai pas joué, mais j’étais quand même très fier de faire partie de cette aventure olympique. J’étais dans le village olympique en tant que n°4, et forcément, lorsque je voyais les matchs, j’avais envie de jouer. Malgré cela, j’en garde un bon souvenir. Je me disais que j’avais fait un grand pas en étant en tribunes, et ça me donnait encore plus d’envie pour entrer dans l’aire de jeu.

L’équipe de France a enchaîné trois victoires en une semaine pour les qualifications aux championnats d’Europe 2023, dont une à Montpellier. Comment as-tu vécu cette opposition devant beaucoup de supporters ? 

C.A : C’était super, cela restera un très bon souvenir. Ce n’est pas tous les jours que nous avons la chance de jouer devant 2000 personnes, notamment en France. Mais cela n’a pas changé ma façon d’appréhender mon match, j’essaye de me concentrer sur moi. Le fait qu’il y ait beaucoup de monde ne m’a jamais vraiment affecté. Au contraire, cela m’a toujours poussé. J’avais vraiment hâte d’y être et j’étais très content du résultat.

Can Akkuzu Montpellier
À Montpellier, l’international français était parvenu à se défaire de l’Anglais David McBeath – Photo : Rémy Gros

Qu’attends-tu personnellement des championnats d’Europe qui se dérouleront en Suède ?

C.A : Premièrement, de me qualifier. Ensuite, nous avons déjà décroché une médaille aux championnats d’Europe en 2019 à Nantes. Cette année, je pense que la France a vraiment une belle équipe. Donc forcément, nous pouvons espérer une médaille. Mais il faut être ambitieux et je pense que nous pouvons dire que nous y allons pour viser le titre. Les joueurs de l’équipe de France ont montré aux derniers championnats du monde que nous pouvions afficher ces ambitions.

Les Jeux Olympiques en France se rapprochent progressivement. Quels sont tes attentes sur ces JO de Paris et as-tu déjà la tête à ça ?

C.A : Actuellement, en France, il y a beaucoup de concurrence. En deux ans, la hiérarchie a été beaucoup bousculée. Finalement, tous les pongistes ont envie d’aller aux Jeux Olympiques, mais de mon côté, je me concentre vraiment sur moi-même. Forcément, j’y pense un petit peu, mais je veux focaliser mon énergie sur ce que je peux maîtriser, c’est-à-dire mon jeu et mon quotidien. Ce que je veux, c’est n’avoir aucun regret.

Que manque-t-il à tes yeux pour que le tennis de table soit plus médiatisé et reconnu ?

C.A : Je pense qu’il manque peut-être un gros résultat. Même si on a eu Simon Gauzy dans le Top 8 mondial, ce n’était pas beaucoup médiatisé… Donc il faut que les gens se rendent compte à quel point ce sport est difficile. Mais il reste compliqué à médiatiser, car il y a beaucoup d’échanges qui ne sont pas faciles à voir à la télévision. Malgré tout, il faudrait quand même mettre plus de tennis de table sur les chaînes de télévision. J’ai l’impression que dès que les gens en voient, ils adorent. Ce genre de promotion du tennis de table peut aider.

Enfin, si tu en as un, quel est ton rêve ultime dans le tennis de table ? 

C.A : C’est un petit bateau, mais je veux donner le meilleur de moi à chaque instant pour arriver là où je peux, parce que je n’ai aucune idée de jusqu’où je peux aller. Je veux tout simplement être le meilleur possible.

Nathan Bigué

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