Alors que vous avez pu revivre le record du monde de Kevin Mayer dans un de nos articles récemment, nous restons dans le décathlon avec peut-être un de ses successeurs et espoir français qu’est Tristan Marcy. Le champion de France junior ne cesse de progresser. Entretien.
Son portrait
Nom : Marcy
Prénom : Tristan
Âge : 20 ans
Région : Provence-Alpes-Côte d’Azur
Club : Athletic Club Salonais
Classement national : 1er junior (2019)
Coach(s) : Chantal Beaugeant
Titre(s) : 2 (France de décathlon et d’heptathlon 2019)
Meilleure performance : 7 454 points au décathlon et 5 484 points à l’heptathlon
Si tu devais te décrire en trois mots…
Tristan Marcy : Enjoué, passionné et persévérant.
Comment as-tu débuté l’athlétisme et qu’est-ce qui t’as mis sur la route du décathlon ?
T.M : Il y a deux petites anecdotes. Quand j’étais petit, à l’école je faisais l’école des sports en primaire. Chaque semaine, on faisait un sport différent en CM1 à l’époque je crois. J’étais amoureux d’une fille et elle faisait de l’athlétisme, on en a parlé ensemble et ça m’a bien branché donc c’est comme ça que j’ai commencé. Ensuite à la base, le décathlon n’est pas ce que je voulais faire, j’étais plus sur du sprint car mes amis de mon âge en faisaient. Cependant, nous n’étions pas très sérieux et notre entraînement ne l’était pas.
À côté de nous, il y avait un autre groupe avec des gens plus âgés, ceux avec qui je m’entraîne toujours à Salon de Provence et qui faisaient du décathlon. Ils m’ont un peu forcé à me mettre au décathlon, ils venaient me chercher pour que je m’entraîne avec eux. Dans ma famille, le sport est important et j’en fais depuis que je suis tout petit donc j’avais quelques facilités et dans le sprint, j’étais bien placé. Mais le décathlon, c’est vraiment car on m’a un peu poussé à en faire que j’ai accroché, avec le temps je me suis de plus en plus intéressé et investi dans ce sport.
Tu as vécu une très belle année 2019 avec deux titres de champion de France à Rennes en salle et à Laval en extérieur. Qu’est-ce qui a fait que tu as réussi à décrocher ces résultats alors que ton meilleur résultat sur la scène nationale était avant cela ta troisième place lors des championnats de France 2017 en cadet ?
T.M : Je ne m’entraînais pas dans l’objectif de faire absolument une performance, je m’entraînais pour le plaisir et le fait de voir que je progressais et que je me rapprochais du niveau d’athlètes qui, deux ans auparavant, étaient pour moi inatteignables. En 2017 aux championnats de France cadets, l’objectif était la troisième place parce que Steven Fauvel et Florian Fourre n’étaient pas atteignables pour moi. Et voir que deux ans plus tard, tous mes entraînements et tout ce que j’ai donné dans la vie de tous les jours m’a permis d’être à leur niveau voir plus fort le jour J, ça fait très plaisir.
Quand tu t’entraînes par plaisir, que tu vois que tu progresses, tu es bien dans ta tête et donc tu t’améliores automatiquement. Finalement, tu arrives sur la compétition confiant, motivé et passionné. Au début de l’année, ce n’était pas le but de remporter les championnats de France mais quand j’ai vu que j’avais progressé, ça l’est devenu. L’hiver était l’objectif mais quand c’est arrivé, c’était une surprise. Une fois que je l’ai fait, l’été a été différent car on savait que j’en étais capable, il fallait réitérer.

Comment as-tu vécu l’expérience des championnats d’Europe à Boras avec l’équipe de France et es-tu satisfait de ta performance là-bas ?
T.M : Ces championnats d’Europe restent un peu mitigé pour moi. Ça reste une expérience folle d’aller en Suède, c’est un pays que je trouve stylé, contre les meilleurs d’Europe voire du monde. En équipe de France, j’ai fait de superbes rencontres et c’était génial. Le cadre était top mais en ce qui me concerne, j’étais un peu déçu de ma performance. Premier grand championnat pour moi, je m’étais mis la pression, le stress est différent de d’habitude car tu as les meilleurs d’Europe contre toi.
Mon début de compétition est raté comparé à ce que j’ai montré le reste de l’année jusqu’au lancer de poids. Ma compétition a réellement démarré à partir de la hauteur, à partir de là j’ai pu enfin m’exprimer et prendre du plaisir. Je suis quand même fier de ma 10e place mais avec le recul, je suis un peu dégoûté de pas avoir fait mieux. Je suis un peu perfectionniste mais le bilan est tout de même positif.
Comment s’est déroulée ta saison hivernale 2019-2020 et quelles conclusions en tires-tu ?
T.M : Cette saison, j’ai changé de mode de vie et de ville pour mes études. L’an dernier, j’étais à Avignon mais j’habitais encore chez moi, je m’entraînais avec le même entraîneur, etc. Cette année je suis à Nice, j’ai changé d’entraîneur, je n’habite plus avec mes parents et je découvre une nouvelle vie. Et tout ça mentalement fatigue. En novembre, j’ai fait ma première compétition de la saison, j’ai réalisé de bonnes performances mais sur la dernière épreuve de la journée, le 60 m, je me suis blessé à l’ischio. On a commencé à se poser des questions car une blessure n’arrive jamais par hasard. Après ça, on a fait un stage et j’ai vu que je n’étais pas prêt à 100 %. On s’est dit qu’on mettait la saison hivernale de côté et qu’on faisait une bonne préparation pour l’été.
Où en es-tu dans ta préparation actuellement et arrives-tu à te fixer des objectifs avec les circonstances actuelles ?
T.M : C’est du maintien de forme physique, je n’ai repris les entraînements que le 21 mai. Pendant tout le confinement, je n’ai fait que du physique et du basket mais pas du tout de technique. Au niveau des objectifs, c’est de toujours continuer à progresser même si je ne peux pas le montrer maintenant, je me dis que c’est toujours ça de pris et dès l’hiver prochain, je repars sur de bonnes bases. Je pense que c’est possible qu’il y ait une saison cet été quand même, elle sera très raccourcie et décalée néanmoins. Par contre, je ne sais pas si ça me branche ou si je préfère repartir sur de bonnes bases pour la saison prochaine.

“Je suis un peu perfectionniste”
Tristan Marcy, décathlonien
Que fais-tu comme études et comment combines-tu sport et entraînement ?
T.M : Je suis en STAPS à Nice. Je n’ai pas d’emploi du temps aménagé car dans ma fac, ils font un peu les sourds avec le sport de haut niveau. J’arrive quand même à m’adapter, j’avais environ 8 h de sport par semaine et donc souvent j’avais sport le matin et athlétisme le soir. À la fac, je faisais le minimum en sport et à l’entraînement je faisais ce que j’avais à faire. Il n’y a que 5/6 fois dans l’année où j’ai dû faire l’impasse sur l’entraînement pour rester en cours.
Quelle est la ou les disciplines que tu aimes le plus ou dans laquelle/lesquelles tu es le plus performant parmi les disciplines du décathlon et pourquoi ?
T.M : Je pense que celle où je suis vraiment meilleur, ce sont les haies. Au niveau français en individuel, c’est là où je suis le plus proche des spécialistes. Je ne saurais pas vraiment l’expliquer mais j’ai le truc, je peux ne pas en faire pendant un mois et quand je vais reprendre, ça va bien se passer.
Quels sont tes points faibles, là où tu dois encore progresser ?
T.M : Mes points faibles viennent du moment où je n’étais pas du tout investi dans mon sport en minimes, à ce moment-là j’ai pris du retard par rapport aux autres et principalement en lancer. Je pense que c’est aussi dû à ma corpulence.

Trouves-tu que le décathlon est une discipline assez médiatisée et les sponsors sont-ils aussi présent que dans les autres disciplines de l’athlétisme ?
T.M : Pour moi, le décathlon n’est pas du tout assez médiatisé. Ça va un peu mieux en France depuis qu’il y a Kevin Mayer mais pour moi on pourrait en faire un spectacle. Je trouve que c’est un peu laissé sur le côté, quand on ne sait pas quelle discipline mettre on met le décathlon. Forcément au niveau des sponsors ça se ressent, tu auras beaucoup plus de mal à trouver un sponsor si tu es décathlonien que si tu es sprinter. Moi je n’ai pas de sponsor, j’avais commencé à avoir quelques pistes avant qu’il y ait le confinement, etc. Il y avait une banque qui devait m’acheter une perche par exemple, des petits trucs sympathiques. Tout a été mis en pause et je pense que ça reprendra la saison prochaine. En décathlon, nous avons besoin de six paires différentes donc c’est un budget mine de rien.
Quel est l’endroit dans le monde où tu aimerais le plus aller un jour t’entraîner ou faire une compétition ?
T.M : En Australie, le cadre est génial là-bas. Ils ont des stades avec des arbres au milieu, ils s’entraînent sur l’herbe et mettent des blocs dans l’herbe. Moi qui aime bien la nature et la verdure, c’est un cadre que j’aime bien surtout avec la température, c’est le paradis.
As-tu une idole ou un athlète que tu admires et/ou de qui tu t’inspires ?
T.M : Ashton Eaton, il y a aussi Kevin Mayer mais le principal c’est l’américain car quand j’ai commencé à m’intéresser au décathlon, à m’investir dedans, j’ai regardé des vidéos pour progresser et je voyais ce mec, pour moi c’était une météorite. Il m’a vraiment impressionné mais lui plus que Mayer car il est arrivé pendant la période où je commençais à m’intéresser et c’est lui que j’ai pris comme modèle.
Crédits photos : Tristan Marcy, GB Photographie et Athletic Club Salonais
Intéressante interview, merci pour la qualité de votre article ! A quand un interview sur un coureur de fond (10 km, marathon) ou de trail running ?
Merci à vous ! Bientôt on vous le promet 😉