Accueil » Faites entrer le coach n°1 : Claude Robin (USL Dunkerque)

Dans le football, on vous parle énormément des prestations des joueurs et à titre personnel nous consacrons également une rubrique aux supporters. Mais où sont les entraîneurs ? Notre nouveau concept « Faites entrer le coach » corrige cette erreur avec un premier numéro dédié au technicien de l’USL Dunkerque qu’est Claude Robin !

Qui êtes-vous, Claude ?

Claude Robin est un ancien joueur de football reconverti entraîneur né en 1960 à Saint-Julien-en-Genevois (Haute-Savoie), il a donc 58 ans. Evoluant au poste de défenseur, il arrive en premier lieu au Servette Genève FC (Suisse) pour n’y rester qu’un an et ensuite rejoint la France à Besançon à l’époque en D1. Les clubs les plus glorieux qu’il aura connu sont le LOSC avec qui il aura été en 1/2 finale de Coupe de France en 1983 puuis 1986, sans oublier l’Olympique Lyonnais en 1986 où il assiste aux débuts de Jean-Michel Aulas à la présidence notamment. Par la suite, il jouera à Grenoble puis Gueugnon en D2 avant d’achever sa carrière en tant qu’entraîneur-joueur à Vesoul de 1993 à 1996. Il totalise sur toute sa carrière 264 matchs en D2 et 101 en D1.

En 1996, il devient l’entraîneur à plein temps de Vesoul qu’il parviendra à faire monter en CFA en 2001. 4 ans après cette montée, il quitte la Franche-Comté pour rejoindre l’AS Saint-Etienne et prendre en main l’équipe réserve pendant deux années. Par la suite c’est à l’ESTAC Troyes qu’il poursuit sa carrière d’entraîneur en 2007 en tant que directeur du centre de formation et responsable des U18. Il a l’opportunité d’effectuer une pige avec l’équipe première en 2009 après le limogeage de Ludovic Batelli pour sauver les troyens de la relégation, il relève le défi en vain. Après cette expérience il revient au centre de formation et prend en main l’équipe réserve de l’ESTAC en 2015 pour la faire monter en CFA, des joueurs comme Djibril Sidibé ou encore Corentin Jean passent professionnels sous sa houlette.
Fin 2015 il est nommé entraîneur de l’équipe première en remplacement de Jean-Marc Furlan avec une situation délicate à gérer encore une fois. Ne pouvant remettre la formation troyenne sur les bons rails, Claude Robin est limogé en février 2016 et rejoint le Red Star FC pour 1 an jusqu’en 2017. Depuis septembre 2018, il est entraîneur à l’USL Dunkerque qui pointe actuellement deuxième du championnat de National avec 26 points en 14 matchs.

Après ce petit portrait, voici l’interview du technicien qui nous parle de ses débuts en tant qu’entraîneur ou encore de sa situation actuelle à Dunkerque

Si vous deviez vous décrire en 3 mots…

Claude : Je suis quelqu’un de plutôt humble et qui a des principes bien à lui, et enfin j’aime mon métier.

Quel a été votre plus beau match en tant que joueur puis en tant que coach et pourquoi ?

Claude : C’est un peu difficile en tant que joueur, j’en ai tellement mais je retiens surtout les bons, il y a toujours plus de bons souvenirs que de mauvais dans ce sport. Alors en tant que joueur, j’en ai beaucoup mais celui qui me vient à l’esprit serait un match de Coupe de France avec le LOSC, on avait éliminé Bordeaux qui était champion de France et ça restera à jamais en moi. En tant que coach, ce serait l’accession en CFA (National 2) avec mon club de Vesoul, c’est un souvenir magnifique même si j’en ai d’autres. Ce dernier match qui nous fait monter en CFA avec mon club de Vesoul restera gravé, je garderais plutôt celui-là pour son aspect émotif.

Vous avez été joueur de nombreuses équipes comme le LOSC ou encore l’Olympique Lyonnais, quel souvenir gardez-vous de vos passages en professionnel ?

Claude : Je suis assez fier de ma petite carrière, on peut toujours faire mieux mais elle a été ce qu’elle a été. Je suis satisfait de mon parcours car j’ai vécu de superbes moments en tant que joueur, j’ai une petite philosophie qui reste la mienne mais en tout cas je reste persuadé de ça. Je pense que j’ai eu aussi de bons moments en tant qu’entraîneur car ça fait bientôt 30 ans que j’entraîne (NDLR : 26 ans exactement). Pour moi, ce sport on l’aime car on y a joué, en tout cas pour ma part je trouve que l’entraîneur est un peu un joueur frustré. En ce qui me concerne, j’ai presque une frustration d’être entraîneur alors bien sûr je ne vais pas dire par là que je n’aime pas ce métier car sinon cela ferait longtemps que j’aurais arrêté. Quand on le vit ce métier d’entraîneur, on le vit car à travers notre parcours de joueur, on souhaite retrouver ces émotions, cette adrénaline qu’on partage avec les joueurs dans les bons comme dans les mauvais moments.

1 (Delta FM)

Après votre carrière, qu’est-ce qui vous a encouragé à vouloir vous reconvertir entraîneur ? Est-ce un avantage d’avoir été joueur pour entamer cette nouvelle carrière ?

Claude : Oui indéniablement être joueur a été un grand avantage, ça regroupe ce que je viens de dire auparavant, je suis un passionné de football et autant j’ai aimé le pratiquer mais autant j’aime le dispenser à mes joueurs. Je suis persuadé que bien sûr ça m’a aidé, ça ne se fait plus maintenant parce que les mentalités ont changé mais j’ai terminé ma carrière en étant « entraîneur-joueur », c’était un moment difficile parce que justement il a fallu bien vivre ce passage et ce n’était pas simple. Finalement, ça m’a endurci pour ce métier de coach.

Comment avez-vous procédé à votre transition joueur/entraîneur ? Avez-vous du passer des diplômes pour cela ?

Claude : J’ai toujours entraîné des équipes de jeunes durant ma carrière de joueur dans les différents clubs où j’étais, par exemple à Lille, à Grenoble ou à Gueugnon. Puis j’ai toujours souhaité terminer avec mon diplôme qui me permettait d’exercer mon métier contre-rémunération pour en vivre. C’est ce que j’ai réussi à faire et j’ai trouvé un club qui m’a proposé un poste à plein-temps en DH, j’y suis resté 12 ans.

Aujourd’hui vous entraînez l’USL Dunkerque, dans quelles conditions êtes-vous arrivé et qu’avez-vous pu constater à votre arrivée ?

Claude : Je suis arrivé à Dunkerque au mois d’octobre dernier (en 2018), le club était en difficulté. J’avais rencontré le président en début de saison qui voulait que je vienne mais pas en tant qu’entraîneur d’équipe, j’ai refusé puis il m’a rappelé 2 mois et demi après et j’ai dit oui car là il me proposait l’équipe. Je suis donc arrivé dans ce club pour une opération maintien, c’était très difficile à n’en pas douter avec plein d’embûches mais bon encore une fois, on a réussi à le faire et tant mieux pour le club surtout. Le challenge maintien, je le connaissais et c’est en toute connaissance de cause que j’ai pris l’équipe, ça ne sert à rien de pleurer sur ces choses parce que j’en avais eu conscience avant de venir. Je n’ai pas été tout seul car j’ai un bon groupe de personnes avec moi notamment comme adjoint, j’avais un groupe qui était difficile mais je ne l’avais pas choisi bien évidemment. C’est toujours plus facile de dire les choses après mais moi j’ai pris la montagne comme elle se présentait et j’ai essayé de la gravir pour surmonter ces difficultés, ce qu’on a réussi à faire et c’est tant mieux.

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« J’ai pris la montagne comme elle se présentait »

Peut-on dire que votre début de saison est surprenant au vue des résultats ou est-ce un cheminement logique selon vous ?

Claude : L’équipe a bien démarré car il y a un bon groupe de joueurs qui se sont mis un challenge commun, ce qui fait la particularité de notre sport c’est que c’est un sport d’équipe et donc quand les joueurs veulent quelque chose ensemble, ils peuvent y arriver. C’est ce qu’ils ont réussi à faire en début de saison, maintenant on essaye de surfer sur ce bon début de saison pour essayer de tenir un maximum de temps dans le haut du classement, on sait que ce ne sera pas simple mais encore une fois les joueurs s’accrochent. Après il n’y a rien de logique, on prépare une saison où on essaye de faire notre mieux possible, il s’avère que ça a pris en début de saison mais tout le monde se prépare pour ça au début. Pour nous, ça a bien fonctionné donc tant mieux, après encore une fois je ne peux pas vous dire si c’est logique ou pas mais en tout cas on se prépare pour faire le mieux possible. On essaye encore une fois de tenir, de tenir et encore tenir le haut du pavé pour avoir les points nécessaires pour se maintenir, après on verra si il y a autre chose à jouer. Nous n’avons pas d’objectif si ce n’est se maintenir plus vite que la saison dernière.

Si l’on devait parler de la patte « Claude Robin », y en a-t-il une et si oui laquelle ?

Claude : J’ai beaucoup de mal à parler de moi, ce n’est pas ma façon de faire, s’il y’en a une je laisserais les autres la commenter. Moi je fais mon métier avec passion encore une fois et je suis bien heureux que l’on m’ait fait confiance et qu’on m’ait donné cette chance d’entraîner ce qui est déjà pas mal. Je n’avais pas de club après Troyes et j’étais bien content de trouver un club qui me proposait un challenge.

Vous avez pu fréquenter le monde professionnel et aujourd’hui semi-professionnel, quelles sont les différences et les similitudes entre ces deux milieux ?

Claude : Ce championnat de National est très relevé parce que c’est un championnat où on demande une exigence de clubs de première division car on va dans toute la France, il n’y a qu’une poule unique de Pau à Dunkerque. On traverse la France de long en large donc c’est un championnat très exigeant parce qu’on n’a pas d’aides des professionnels et on a des déplacements qui sont très difficiles. On est un petit peu logés à la même enseigne que des clubs qui ont le statut professionnel dans ce championnat et qui eux bénéficient d’avantages et d’aides surtout financières, c’est un peu ça la difficulté. Il est vrai dans tous les championnats mais au moins dans tous les championnats quand c’est professionnel, c’est tout le monde qui l’est et qui est aidé à sa juste proportion. Après on ne va pas comparer par exemple les mannes financières d’un Paris Saint Germain et d’un Amiens mais au moins tout le monde est professionnel et on fait en fonction, tandis que nous on a des joueurs amateurs dans un milieu professionnel et on a des exigences complexes. Après pour une équipe professionnelle, ce n’est pas simple non plus car il faut aussi investir mais c’est cette relation-là qui n’est pas facile, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne au niveau des aides notamment. Je pense que ça serait bien de créer une troisième division professionnelle dans notre football français.

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Que représente la Coupe de France à vos yeux et quel lien vous unit avec cette compétition ?

Claude : Non, il n’y a pas vraiment de lien même si j’ai toujours assez bien figuré avec mes différents clubs en Coupe de France, je crois bien que je suis invaincu dans le temps réglementaire contre une équipe hiérarchiquement supérieure ! Je me suis fait éliminer aux penaltys ou aux prolongations contre ces équipes mais je n’ai jamais perdu, c’est déjà pas mal et ça a perduré vu qu’on a battu Le Havre lors de ce 7ème tour avec Dunkerque. On va croire à la bonne étoile, après je suis un peu inquiet car on rencontre une équipe hiérarchiquement inférieure au prochain tour, ça ne va pas être si simple (Reims Ste Anne, club de R1). S’il y a un lien qui m’unit à cette coupe, c’est peut-être celui-là car j’ai été deux fois en demi-finales avec mes clubs professionnels et j’ai eu assez de réussite je trouve dans cette coupe. Je trouve ça formidable que dans notre football nous puissions voir une Coupe de France digne de ce nom, c’est une compétition magnifique que l’on ne voit pas ça dans les autres sports comme le handball ou le basket qui sont des sports assez sélectifs. On ne voit pas une équipe départementale affronter une équipe nationale c’est impossible, il n’y a qu’au football que cela est possible et c’est une particularité de notre sport que je trouve superbe.

Les clubs français sont-ils trop exigeants ou pressés vis à vis des entraîneurs ? Avez-vous déjà vécu vous-même une éviction ?

Claude : Oui malheureusement j’ai connu ça à Troyes, c’est d’ailleurs pour ça que c’est encore une cicatrice qui ne s’est pas tout à fait cicatrisée et qui n’est pas prêt de l’être. Après c’est le foot, jusque-là tout se passait bien mais c’est sûr que maintenant il n’y a plus de place pour la patience, il faut tout de suite obtenir des résultats et c’est le football qui est comme ça. C’est malheureux et dommageable mais c’est comme ça, on le sait pertinemment quand on prend une équipe en charge. Lorsqu’on est évincé, c’est une grosse frustration et un sentiment de profonde injustice mais je crois qu’aujourd’hui les entraîneurs sont préparés de plus en plus à ça et encore une fois, j’ai beaucoup de mal avec ça car je trouve que les choses ne se construisent pas comme ça en un coup de baguette magique. Malheureusement, nous ne sommes pas patients dans notre football mais je ne crois pas que ça va aller dans le bon sens. On avait bien le meilleur entraîneur d’Europe l’année dernière que tout le monde s’arrachait, puis en 6 mois il a été évincé (référence à Mauricio Pochettino limogé de Tottenham). Il a été en finale de Champions League, ce n’est pas donné à tout le monde puis il a été limogé, en 6 mois il est devenu « mauvais entraîneur » donc ce n’est pas simple. Vous voyez les exemples comme ça dans les grands clubs, alors bien évidemment tous nos présidents voient ça et se disent que c’est la bonne solution miracle.

Quel serait votre rêve le plus cher ?

Claude : Mon rêve serait de finir ma vie d’entraîneur comme elle a commencé c’est-à-dire sans aigreur et sans amertume, bien terminer cette vie remplie de football en tant que joueur puis entraîneur. Finir celle d’entraîneur de la même manière que celle de joueur serait parfait, rien ne pourrait m’arrêter d’exercer mon métier car être entraîneur est passionnant malgré tout. J’estime que maintenant la grande chance que l’on peut avoir, c’est la santé et avec la santé justement on peut tout faire, il faut se souhaiter ça surtout pour ce métier qui prend beaucoup sur soi. Moi je suis quelqu’un qui fonctionne beaucoup avec des challenges et je crois encore un peu en l’être humain, je m’évertue à fonctionner avec cela et j’estime que c’est encore par-là que l’on peut évoluer même si d’autres ne le pensent pas. Tant que je crois en ça, je ne me lasserais jamais de ce que je fais et quand cela diminuera dans ma tête, évidemment que j’arrêterais.

Merci Claude de nous avoir accordé cet entretien, bon courage pour la suite de la saison !

Crédits photos : Delta FM et USLD

Pavel Clauzard&Lenny Lussot – 27 Novembre

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