Avant d’être une compétition, la Coupe de France symbolise tout ce que représente le football amateur et même professionnel, à savoir la convivialité, le plaisir, le partage ou encore l’entraide. Dans cette période difficile pour tous, il est nécessaire de retrouver cet état d’esprit-là. À chaque tour de coupe, vous aurez l’occasion de découvrir une histoire, une équipe, une famille, un pan du football français. Après le 4e tour et à l’aube du prochain, c’est le Wasquehal Football qui ouvre le bal avec un destin bien particulier en Coupe de France, le liant à un grand club européen en 2016 notamment.
La genèse wasquehalienne

Tout commence en 1924 avec la création du club sur une idée d’Arthur Buyse et notamment entouré de Lucien Montagne, qui verra naître un stade en son nom, et Louis Mulliez, membre de la célèbre famille Mulliez qui a fondé Auchan. L’aventure débute sous le nom d’Union Sportive de Wasquehal et en 4e division de district. Petit-à-petit, l’équipe monte en gamme et en divisions pour finir par atteindre la Promotion d’Honneur en 1936, juste avant la Seconde Guerre Mondiale. Cette tragédie a malheureusement décimé l’effectif wasquehalien avec 20 décès dont six affectant directement l’équipe première. Des cendres naît une nouvelle association entre l’US Wasquehal et l’AS Wasquehal en 1945, ce qui donne l’Entente Sportive de Wasquehal qui évolue en jaune et noir. Malgré de belles ambitions, le club connaît une stagnation dans les années 1950, due à un exode massif des joueurs vers le LOSC.
Par la suite, il n’y a pas de réel progrès jusqu’en 1981 où l’ESW accède à la Division d’Honneur et remporte de nombreux titres régionaux au fil des années. Dans cette ascension, un hommage au fondateur est rendu puisque le stade s’appelle désormais Stade Arthur Buyse. En 1991, après un parcours fastueux en coupe, le club connaît une progression fulgurante. Il accède 4 ans plus tard au championnat de National, troisième échelon du football français. William Loko, frère de l’international Patrick, rejoint l’effectif wasquehalien et brille de son talent dès son arrivée avec 10 buts inscrits en une saison. En 1997, coup de tonnerre puisque Wasquehal accède à la Ligue 2 et récolte de ce fait le statut d’équipe professionnelle. Elle abandonne son enceinte qui n’est pas aux normes et investit le Stadium Nord à Villeneuve-d’Ascq. Les débuts sont difficiles mais l’essentiel est là : le club décroche son maintien en parallèle de bons parcours en coupe.
Néanmoins en 1999, la Direction Nationale du contrôle de gestion met en garde l’ESW pour cause de déficit, une rétrogradation les attend si la situation ne s’améliore pas. Solidarité nordiste oblige, le RC Lens met en place un partenariat avec les wasquehaliens d’une durée de 3 ans qui a pour objectif de prêter de jeunes lensois en échange d’une contribution financière. Malheureusement, quelques années plus tard, le destin en a voulu autrement et Wasquehal est relégué en National à l’issue de l’exercice 2002-2003. S’ensuit une période difficile de l’histoire du club avec d’autres descentes pour arriver en CFA 2 (actuel N3) en 2008. L’année suivante, l’équipe est de retour au Complexe Lucien Montagne et doit trouver un nouveau souffle. En 2014, le président Brahim Chikhi veut insuffler cette nouvelle dynamique, cette dernière s’opère puisque l’Entente retrouve le CFA dès la première année de son mandat. Après de nombreux problèmes administratifs et d’homologations, la mairie décide de fusionner l’ES Wasquehal et le Wasquehal Football Club pour ne faire qu’un et donner Wasquehal Football. Malgré une fusion ambitieuse, rien ne va puisque l’équipe est reléguée en Régionale 1 en 2019 et voit son président démissionner après des tensions internes. Finalement, Mehdi Izeghouine prend les rênes de l’équipe en tant qu’entraîneur. Eric Decoudun et Didier Cabaye sont respectivement nommés président et vice-président. Leur objectif, rebattre les cartes et insister sur la formation pour permettre aux jeunes de performer.
Une équipe bien installée sur son petit nuage

Le club a connu des hauts et des bas depuis le début de son existence, de superbes épopées en Coupe de France ou encore de belles montées, jusqu’en Ligue 2 entre 1997 et 2002. À l’inverse, Wasquehal a vécu des moments difficiles notamment des relégations et quelques problèmes financiers. Néanmoins, depuis peu, il fait bon d’être supporter wasquehalien. L’équipe a le vent en poupe, avec une saison 2019-2020 terminée à la 1e place de Régionale 1, et un début d’exercice 2020-2021 irréprochable. Les nordistes sont actuellement leaders du championnat avec quatre victoires et un nul.
Outre les résultats, le spectacle est au rendez-vous au Complexe Lucien Montagne. L’entraîneur Mehdi Izeghouine l’affirme : « Je prends du plaisir à regarder Wasquehal jouer ». Il insiste ensuite sur l’état d’esprit de ses joueurs et de l’ensemble du staff : « C’est un début de saison hyper positif, grâce à l’investissement des joueurs et du staff qui font un super boulot. » Etat d’esprit que l’on a retrouvé lors du dernier match de championnat face à Amiens B. Les wasquehaliens étaient menés 2-0 à la pause, avant de faire preuve de caractère pour finalement s’imposer 3-2.
Par ailleurs, la fin de saison 2019-2020 avait été marquée par la crise sanitaire et par l’arrêt des championnats. En étant leader de son groupe, Wasquehal a bénéficié de la règle imposée par la ligue : le premier de chaque poule est promu. Le président du club, Éric Decoudun, a commenté cette décision : « Bonnes ou pas bonnes, les décisions, il faut qu’elles soient prises. » Tout en précisant, sur le ton de l’humour, que s’ils avaient fini deuxième, ils auraient « fait la gueule. » Un membre de la direction d’Ascq (équipe adverse lors du 4e tour de Coupe de France) s’exprime également sur le sujet, en qualifiant le phénomène « d’extraordinaire » et en insistant sur le fait que les décisions prises sont inédites, et donc « basées sur une expérience inexistante. ».
Pour cette nouvelle année, le président wasquehalien affiche son ambition première : se maintenir rapidement. C’est en bonne voie, même si l’ensemble du club reste focalisé et aborde les matchs les uns après les autres. Marco Cato, milieu de terrain, est arrivé cette année en provenance de la réserve de Boulogne-Sur-Mer (National). Pour lui,« c’est un bon début de saison, il faut rester lucide. » Comme son président, il insiste sur l’objectif majeur qu’est le maintien.
Wasquehal et la Coupe de France : une histoire qui dure

S’il y a bien une équipe cendrillon qui avance beaucoup plus loin que prévu dans un tournoi, c’est bien Wasquehal. En 1991, ils affrontent le PSG d’Henri Michel en 1/32 de finale de Coupe de France et se font sortir sur la plus petite des marges (0-1). L’année 2016 sera certainement celle de leurs plus grands exploits. Lors la campagne de 2015 à 2016, le club nordiste (N3 qui terminera premier de son groupe) s’est payé le luxe, au 8e tour, de battre Metz (2-1), tout juste relégué en Ligue 2 à l’époque. Pour les 32e de finale, le PSG s’est déplacé au Stadium Lille Métropole de Villeneuve-d’Ascq et mettra fin à l’épopée des amateurs (défaite 0-1 sur un but de Zlatan Ibrahimovic). Sortant par la grande porte, ils n’ont pas eu à rougir de leur performance. La saison suivante, ce sera le RC Lens, au 8e tour, qui sortira Wasquehal (promu en N2). En remontant un peu plus loin dans le temps, les meilleures performances du club en termes de tours passés eurent lieu de 1998 à 2003. Ce fut certainement la période la plus faste du club, période où il évoluait en Ligue 2. Ainsi, en 2001 et 2003, les 1/8 de finale ont été atteints. Respectivement, Troyes (Ligue 1, 1-0) et Bordeaux (Ligue 1, 4-1) les stopperont.
Pour cette année, « Il faudra passer le septième tour pour que l’on puisse considérer que ce soit une campagne réussie », affirme l’ambitieux président de Wasquehal. Cela s’explique par différents points. Premièrement, au-dessous de cette étape, il n’y aurait pas de plus-value financière à proprement parler. Deuxièmement, c’est la seule manière de faire parler des joueurs : talentueux et méritants certes, mais qui ont raté une marche pour atteindre le monde professionnel. Une belle publicité pour ces potentiels futurs joueurs de Ligue 1 ou d’un des quatre autres grands championnats européens. Alassane Pléa (Borussia Mönchengladbach en Bundesliga) et Adrien Tameze de 2008 à 2009 (Hellas Vérone en Serie A), Moussa Niakhaté de 2011 à 2012 (Mayence en Bundesliga) sont tous passés par Wasquehal. Ces exemples de réussite rappellent le premier objectif du club : la formation. Pour le président, c’est un élément indissociable, au même niveau que Philippe Piat (secrétaire général Wasquehalien décédé en 2012). Ce dernier possède une plaque en son hommage au sein du club house du Wasquehal Football. Incorporer les jeunes dans l’effectif s’est révélé payant au 4e tour de la Coupe de France.
Dimanche 4 octobre, les joueurs de Mehdi Izeghouine se sont déplacés à Villeneuve-d’Ascq (R2). Deux divisions séparent ces équipes. Rabah Bouramoula ouvre le score à la 25e et Sacha Hamache, attaquant de pointe, finit par égaliser à la 63e minute. Face à une équipe valeureuse, Wasquehal a été poussé jusqu’aux tirs aux buts. Trois des visiteurs étant nés en 2001 se sont portés volontaires pour tirer un penalty : tous ont marqués. Ce sera finalement le gardien adverse, qui aura entretenu l’espoir d’une qualification pour l’US Ascq, qui va être le seul à rater sa tentative et buter sur Romain Samson (5-4).
Une épopée en Coupe de France peut-elle desservir le championnat ? Solide leader après 5 journées, le promu ne perd pas le nord. Mehdi Izeghouine, qui se dit « dans l’accompagnement », privilégie la seconde compétition : « Un championnat est représentatif des performances et de la régularité » souligne-t-il. Mais l’un n’empêche pas l’autre. Ayant lui-même disputé un 32e de finale contre le PSG en 2016, il connaît les émotions que ce genre de rendez-vous procure. Il peut s’appuyer sur un groupe très compétitif, raison pour laquelle il possède « des certitudes pour les deux compétitions. » La preuve en est que sept joueurs titulaires n’ont pas été sélectionnés pour le quatrième tour. Une chose est sûre, selon le coach du club nordiste, il « jouera les 2 compétitions à fond. » Wasquehal se déplacera à Tourcoing (R1) le dimanche 18 octobre pour tenter de rallier le 6e tour.
Crédits photos : Eric Decoudun, La Voix du Nord et Gaël Henanff
Bravo pour le travail de recherche et le style..