Tout juste élu MVP de la saison en Nationale 1, Joe Burton marque une nouvelle fois de son empreinte le basket français. Actuellement au BC Orchies, le pivot américain retrouve une seconde jeunesse et le plaisir du jeu et du partage. Doté d’une histoire forte, ce joueur est un humaniste profond à la vision novatrice de son sport. Entretien.
Joe Burton est un joueur de basketball âgé de 32 ans et né aux États-Unis, en Californie. Il effectue ses débuts en NCAA (sport universitaire) du côté de l’Oregon avec les Beavers. C’est en 2013 que le pivot décide de rejoindre l’Europe avec une première expérience au Danemark, à Aalborg. Cette expérience lui permettra de se révéler avec près de 22 points de moyenne sur la saison. Après un saut aux Pays-Bas, Burton rejoint Évreux, son premier club français, en 2015. Tout s’enchaîne pour lui, puisqu’il réalise une saison dantesque, ponctuée par une finale de playoffs ainsi que le titre de MVP, son premier. Au fil de la Pro B, l’Américain va atterrir en Pro A en 2019, du côté de Roanne. Avec des escales en Finlande notamment, Joe Burton finit par rejoindre le BC Orchies cette année, en Nationale 1. Il s’est livré sur son choix, ses expériences de vie ou encore sa vision du basket.
Si tu devais te décrire en trois mots…
Joe Burton : Native (NDLR : amérindiens aux Etats-Unis), mari et joueur de basket.
Peux-tu nous parler de ton enfance à Soboba et qu’est-ce que cela représente pour toi ?
J.B : J’ai grandi dans la réserve de Soboba, au sud de la Californie. Les conditions se sont améliorées depuis le temps où j’y étais, ce qui est une bonne chose. Car en fait, on veut toujours l’améliorer pour les prochaines générations à venir. Grandir là-bas, c’était bien, car j’y ai vécu beaucoup d’expériences de vie. Je viens d’une famille sportive, on jouait beaucoup dehors. Ils m’ont inculqué et transmis cette tradition qui fait la personne que je suis aujourd’hui. D’ailleurs, mes coéquipiers m’ont posé des questions à propos de mes origines, alors je leur ai expliqué cette culture qui est en moi. Je suis fier d’être un « native american ».
Tu as déjà été MVP de Pro B en 2016 et tu l’es cette année en NM1. Comment fais-tu pour être encore aussi dominant ?
J.B : Je joue simplement mon jeu, en faisant ce que l’équipe attend de moi. Mais le but est de gagner les matchs, peu importe mes statistiques à la fin. Dans les bonnes équipes européennes, tout le monde peut scorer et être dominant. J’aime bien quand tout le monde met sa pierre à l’édifice pour remporter un match.

Cette saison, tu as rejoint le BC Orchies après une année blanche. Pourquoi avoir choisi ce projet en Nationale 1 ?
J.B : L’année dernière, j’ai pris une année off après avoir fait une bonne saison en Finlande (NDLR : plus de 17 points et 9 rebonds par match à KTP Basket, en première division). On sortait de la période du Covid, et j’ai eu des offres pour revenir en France, mais cela ne s’est pas fait à cause des vaccins. Du coup, je suis retourné en Californie et j’ai coaché une équipe dans le lycée à côté de chez moi. Je n’avais pas passé autant de temps chez moi depuis 2012 !
Après la Finlande, j’ai coupé du basket pendant deux mois. Mais quand je me suis mis à coacher, cela m’a donné envie de reprendre. Alors j’ai entretenu mon état de forme toute l’année dernière pour être prêt si on me sollicitait. Cet été, très peu d’équipes me voulaient. J’ai dit à mon agent : peu importe où je vais, je veux juste jouer ! Ils m’ont appelé car ils recherchaient un pivot capable de dominer. Je n’ai pas hésité, j’ai fait un programme physique tout l’été, qui m’a fait perdre entre 30 et 40 kilos. Grâce à cela, je me sens bien et mon corps aussi. C’est peut-être la deuxième ou troisième saison de toute ma carrière où je suis vraiment en forme physiquement (rires). Mais si je n’avais pas signé de contrat cette année, je pense que j’aurais pris ma retraite.
En France, tu as déjà joué en Pro B et en Pro A. Quelles sont les différences avec la Nationale 1 ?
J.B : Avant d’arriver à Orchies, je croyais que la Pro B, c’était la jungle. Mais la vraie jungle, c’est la Nationale 1 ! Je dis cela parce que c’est encore plus physique que la Pro B. On doit se battre, mais j’aime cela. Je n’ai joué qu’une demi-saison en Pro A, mais le jeu est plus tourné sur le QI basket et l’intelligence de jeu. En Pro B, l’objectif c’est de monter en première division, donc c’est très physique. Mais la Nationale 1, encore plus, même si le rythme est plus lent !
À Orchies, les fans sont nombreux derrière l’équipe pour vous encourager. Est-ce une source de motivation supplémentaire ?
J.B : Les fans sont supers ! Surtout Les Bugs, ils nous encouragent toujours avec leurs tambours et leurs drapeaux. J’adore les supporters, vraiment. Les matchs avec la salle pleine, c’était fou, l’énergie était incroyable ! Ils nous apportent de l’énergie, nous encouragent, même dans les mauvais moments. C’est pour cela que c’est important pour moi de leur rendre après les matchs, en faisant le tour de la salle, pour prendre des photos, signer des autographes… C’est ce respect que l’on m’a inculqué dans mon éducation.

“Je croyais que la Pro B, c’était la jungle. Mais la vraie jungle, c’est la Nationale 1 !”
Joe Burton, basketteur américain
Tu as fini un match en triple-double le 10 février dernier (19 points, 17 rebonds et 10 passes contre Besançon). Tu es le deuxième joueur du championnat à avoir réalisé pareille performance cette saison (avec Hugo Suhard du CEP Lorient). Est-ce une première dans ta carrière et comment ces statistiques peuvent représenter ta générosité sur le terrain ?
J.B : L’équipe avait vraiment bien joué ce soir-là, Thomas (Van Ounsem) aussi avait fait un super match ! J’avais déjà fini un match en triple-double au lycée. D’ailleurs, c’était même un quadruple-double, avec 10 contres. En professionnel, j’ai dû en faire un ou deux, mais je ne m’en souviens plus. C’est une chose compliquée à réaliser, parce qu’il faut être bon et complet dans plusieurs catégories de statistiques.
En ce qui concerne les passes, mes coéquipiers me rendent la tâche facile, car ils se démarquent vraiment très bien. Je suis un joueur qui aime faire des belles passes pour mettre mes coéquipiers dans de bonnes conditions pour scorer. On me reproche même parfois d’être trop collectif ! Je joue pour gagner, évidemment, mais aussi pour satisfaire les fans qui sont venus.
Quelles sont les forces de l’équipe cette année ?
J.B : Je dirais que l’on est toujours là les uns pour les autres. En défense par exemple, je ne suis pas le plus rapide, mais je peux toujours compter sur mes coéquipiers. En attaque, c’est pareil. Si je me fais trapper, je sais que je vais pouvoir ressortir la balle sur un gars ouvert qui fera le bon choix. Chaque joueur a été choisi pour une compétence différente, personne n’a le même job au sein de l’équipe. On est tous nouveaux ici, hormis Joffrey (Verbeke) qui devrait avoir une statue devant la salle, depuis le temps qu’il est là (rires). On a des gros shooters, des jeunes prometteurs, des guerriers, des mecs qui savent tout faire sur le terrain ! Cela nous rend imprévisibles, et je trouve que l’on joue vraiment bien ensemble.

Envisages-tu de rejouer à un plus haut niveau après cette grosse saison ?
J.B : Pour l’instant, je m’éclate à Orchies. Mais oui, c’est sûr que c’est toujours bien de jouer au plus haut niveau possible. Concernant le futur, je donne toujours l’opportunité à mon club de me proposer un contrat avant d’écouter les offres extérieures. Cela serait vraiment cool de voir Orchies de retour en Pro B. Si on monte, j’aimerai vraiment rester ici. J’ai 32 ans, j’ai encore quelques années devant moi. On a joué cette saison contre Ludovic Chelle (40 ans, Pont-de-Chéruy) et Mykal Riley (37 ans, Besançon), cela me donne envie de continuer.
Joe Burton, que dirais-tu à un jeune joueur qui rêve de devenir basketteur professionnel ?
J.B : Travaille dur et ne t’arrête pas ! Ce n’est pas impossible de devenir professionnel, il faut beaucoup travailler et être prêt à faire des sacrifices. Pour connaître la détermination des jeunes, j’aime bien leur poser une question simple : tu dois choisir entre une fête d’anniversaire et ton match de basket, qu’est-ce que tu choisis ?
Je pense que les jeunes joueurs européens ont plus d’opportunités de jouer en professionnel qu’aux États-Unis, parce que c’est une structure différente. Ici, cela marche avec des clubs et non par écoles, universités… En Europe, les jeunes peuvent jouer en pro vers 16 ans, je trouve cela bien. L’exemple de Romain (Hoelztel) illustre bien ce que je suis en train de dire.
Très bel interview. Joe est un très bon joueur et surtout un super gars. Toujours disponible pour ses coéquipiers et aussi pour les supporters. Je lui souhaite bonne chance pour la suite et si c’est au B.C.O ce serai encore mieux.