La photographie interpelle. D’habitude bourrée de sponsors, la monoplace de Haas est dépourvue de son sponsor principal et des couleurs russes qui ornent à l’accoutumée la voiture. À son bord, le pilote Nikita Mazepin, en plein test de pré-saison de Bahreïn, fait l’objet de rumeurs toujours plus nombreuses quant à son avenir. La raison de ce chamboule-tout ? Le conflit russo-ukirainien qui a éclaté à la fin du mois de février dernier. Quand la géopolitique rencontre la Formule 1, les choses vont vite, les rumeurs vont bon train et les mesures sont fortes. Timeline des répercussions sur la Formule 1 de l’invasion russe en Ukraine.
LA JOURNÉE DU 24 FÉVRIER OU LE DÉBUT D’UN IMPACT CONSIDÉRABLE

Alors que la seconde journée de test de pré-saison à Barcelone est sur le point de débuter, la situation politique se gâte. La Russie annonce envahir l’Ukraine. S’ensuit un communiqué de la Formule 1 assurant que « la F1 surveille de très près l’évolution de cette situation, comme tout le monde, mais pour l’instant aucun commentaire concernant la course en septembre ne sont nécessaires. Nous continuerons de surveiller la situation ». Si le grand prix de Russie est ici vaguement abordé en hauteur dans le communiqué, un pilote s’exprime sans réserve. Sebastian Vettel, quadruple champion du monde et fervent défenseur des droits de l’Homme, annonce ne pas concourir au GP de Russie cette saison. Bientôt, l’actuel champion du monde Max Verstappen en rajoute une couche et déclare : « quand un pays est en guerre, ce n’est pas normal d’aller y rouler ».
C’est au soir du 24 février que la situation devient politique au niveau de la F1. En effet, les équipes se réunissent pour parler du week-end de course russe censé avoir lieu dans la seconde partie de saison, à Sotchi, du 23 au 25 septembre. En attendant la réponse du collège des dirigeants d’écurie, l’heure est déjà à la prise de décision du côté de Haas. Bien qu’il s’agisse d’une écurie américaine, son sponsor principal qu’est UralKali, pressenti comme sponsor-titre, est lui russe. Haas décide donc de le retirer, tout comme les couleurs russes, de sa monoplace et de tous les éléments dans le paddock. Des photos ne tardent pas à circuler où les employés de l’équipe, juchés sur des échelles, s’affairent à enlever les autocollants des camions et motorhomes de l’écurie. C’est une monoplace vide de sponsors et toute blanche qui prend la piste le lendemain.
Son pilote Nikita Mazepin, russe de nationalité, ne tarde pas non plus à être dans la tourmente. Son père étant un proche conseiller de Vladimir Poutine, les deux hommes étant réunis le matin même du 24 février, les rumeurs de départ du fils Mazepin s’additionnent à celles du départ d’UralKali en tant que sponsor, les deux étant liés. Haas ne se précipite pas pour autant et annonce prendre des décisions sur ces sujets au cours de la semaine suivante.
LE DÉBUT DES PREMIÈRES SANCTIONS

Dès le lendemain, les premières mesures au niveau de la Formule 1 sont prises. La première d’entre elles fait suite à la réunion des dirigeants d’écurie. Il a été décidé qu’en l’état actuel des choses, il était impossible de courir en Russie. La décision est annoncée par communiqué. Le 28 février, la fédération ukrainienne de sport automobile est la première fédération à se saisir du conflit. Elle demande à la FIA d’interdire les pilotes de concourir sous licences russes et biélorusses. Une réunion extraordinaire est convoquée par Mohammed Ben Sulayem, président de la FIA, pour discuter de la crise. Dès le lendemain, il ressort de cette réunion que les pilotes titulaires de licences russes ou biélorusses ne pourront pas courir avec ces-dernières, mais pourront exercer leur profession sous drapeau neutre. Il en ressort également qu’aucune écurie de ces deux nationalités ne pourra participer aux compétitions internationales jusqu’à nouvel ordre, mais également que les représentants russes et biélorusses à la FIA se retirent momentanément de leurs fonctions.
Le Grand Prix de Russie, lui, est de nouveau réaffirmé comme étant annulé en ce 1er mars. Le lendemain, mercredi 2 mars, une nouvelle fédération automobile prend des mesures radicales. La fédération britannique interdit tous pilotes de licences russes et biélorusses à courir en Grande-Bretagne. Sacré cadeau d’anniversaire pour le pilote Nikita Mazepin, qui apprend le jour de ses 23 bougies qu’il ne pourra pas courir à Silverstone cette année.
Dans la journée qui suit, tous les contrats passés avec des circuits de F1 russes sont rompus : Sotchi est de nouveau concerné, mais Saint-Pétersbourg, censé entrer au calendrier en 2023, est par ailleurs concerné et annulé.
HAAS ET MAZEPIN PARTICULIÈREMENT TOUCHÉS

Les derniers jours et les dernières mesures prises ont particulièrement touché l’équipe Haas, de par son sponsor russe UralKali, et son pilote de même nationalité Nikita Mazepin. Le 5 mars dernier, après la semaine de réflexion annoncée par l’équipe américaine, il est annoncé que l’accord avec UralKali prend fin. Par la même occasion, Haas se sépare de son pilote Nikita Mazepin, dont l’ascension en F1 a en partie été rendue possible par le sponsor. Quatre jours plus tard, Nikita Mazepin s’exprime sur son limogeage. « J’avaisl’intention de courir en tant que pilote neutre. La FIA a d’abord autorisé cette décision, et j’ai été heureux de l’accepter. Cependant, la nuit précédant la résiliation de mon contrat, une lettre supplémentaire a été envoyée. Le temps que nous traitions cette lettre et que nous examinions les options, parce qu’elle contenait de nombreuses clauses, j’ai pris note de la résiliation de mon contrat le lendemain matin. Je n’ai même pas eu le temps de dire “oui”, je venais simplement d’être licencié. J’ai appris le licenciement au moment même où il a été communiqué à la presse. Je n’ai reçu aucune indication, ni aucun soutien. Je n’ai pas parlé à Günther depuis que j’ai quitté Barcelone, le troisième jour des essais. Il ne m’a donné aucune information sur la décision que l’équipe allait prendre ».
Le pilote russe en profite également pour créer sa fondation We Compete As One. Derrière la ressemblance flagrante avec le programme We Race As One de la Formule 1, mis en place pour lutter contre les inégalités et discriminations, il s’agit là d’accompagner les sportifs ne pouvant plus exercer leur profession pour des raisons politiques.
Concernant le baquet laissé vide chez Haas, les rumeurs allaient bon train. On annonçait successivement Antonio Giovinazzi, Nico Hulkenberg, Pietro Fittipaldi ou de jeunes pousses comme Oscar Piastri, champion actuel de Formule 2. La surprise vient de Kevin Magnussen. Fin connaisseur de la maison, le Danois a piloté chez Haas de 2017 à 2020. Son contrat n’ayant pas été prolongé à la fin 2020, cette fois-ci, le pilote de 29 ans est parti pour rester avec un contrat pluriannuel.
Crédits photos : Eurosport, Motorsport, Tass et Motorsinside
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