Éliminées en demi-finales des championnats d’Europe de tennis de table, les équipes de France masculine et féminine ont toutes les deux récolté la médaille de bronze. Deux performances qui nourrissent espoir et déception à l’aube d’une année charnière.
À moins de dix mois des Jeux Olympiques 2024 en France, les championnats d’Europe de tennis de table à Malmö (Suède) étaient l’occasion parfaite pour affirmer les ambitions internationales des équipes de France. Après une phase de poules maîtrisée, aussi bien chez les hommes que chez les femmes, la France s’est lancée à la conquête de médailles. Pour cela, les Bleus ont d’abord bataillé contre la Slovénie (3-2) et la Belgique (3-1), avant de chuter contre le pays hôte, la Suède, en demi-finale (1-3). Les Bleues, quant à elles, sont tombées face à la Roumanie, après avoir effacé l’Autriche (3-0) et la Slovaquie (3-1). Une compétition historique, donc, puisque les deux équipes de France n’avaient jamais été qualifiées toutes les deux dans le dernier carré des mêmes championnats d’Europe.
Félix Lebrun, la force tranquille tricolore

Positionné à chaque reprise en tant que n°1 par le sélectionneur Nathanaël Molin, le plus jeune des frères Lebrun, Félix (17 ans), a complètement confirmé les attentes placées en lui. Après une phase de poules sans accroc, le n°15 mondial a tenu son rang contre les leaders, voire mieux.
Contre la Serbie en huitièmes de finale, il a d’abord écarté le géant Darko Jorgic (n°11 mondial) au terme d’un match absolument dantesque. Très vite devant au score (11-5), le Montpelliérain a ensuite connu un étrange coup d’arrêt dans les deux suivants, où le Slovène a multiplié les coups géniaux dans la diagonale revers (2-11/6-11). Deux des meilleurs joueurs du circuit européen en revers se sont alors livrés une intense bataille, que Félix Lebrun est parvenu à renverser en sa faveur (11-4/11-9). Il s’est aussi chargé de terminer le travail contre les Slovènes en remportant le cinquième et dernier match contre Peter Hribar (n°335), avec facilité (3-0).
En quarts de finale, face à la Belgique, Félix Lebrun a d’abord effacé le n°1 de cette sélection, Adrien Rassenfosse. Un joueur qu’il a connu dans les catégories jeunes et qui lui avait, jusqu’à présent, souvent posé problème. Mais sur ce coup-ci, le pongiste de 17 ans a été intraitable. Grâce notamment à un coup droit salvateur, où son adversaire a régulièrement tenté de le désastibiliser. En vain (3-0). Son match contre le n°2 belge, Cédric Nuytinck (n°79), a quant à lui été une formalité (3-0).
C’est le lendemain, surtout, que “Féfé” a impressionné le public présent à Malmö. En effet, en demi-finale contre la Suède, pays organisateur, la jeune pousse du ping français a balayé l’attraction suédoise Truls Möregårdh (n°12). Toujours avec sa prise “chinoise” si particulière, Félix Lebrun a gêné le Suédois par ses démarrages en rotation. Aussi, bien aidé dans la dernière manche par la bande du filet, l’international français a complètement fait disjoncter son adversaire, dépassé et sans réponse (3-0). S’il n’a pas pu disputer l’ultime match face aux Suédois, en raison de la défaite de son frère Alexis Lebrun dans le “match 4”, le “jeune Lebrun” a néanmoins réalisé des Europes remarquables. Par ailleurs, il devrait se rapprocher un peu plus du Top 10 mondial. Autant dire qu’à quelques mois des Jeux Olympiques, Félix Lebrun peut se donner le droit de rêver !
Qu’a-t-il manqué aux Bleus pour faire mieux ?

Très attendu depuis son second titre de champion de France en mars 2023, mais surtout suite à sa victoire contre l’ancien n°1 mondial Fan Zhendong en avril dernier, Alexis Lebrun vit une période plus délicate. En Suède, il a plutôt été éclipsé par les performances de son frère. Pourtant, tout n’est pas à jeter.
Dans la peau de n°2, il s’est logiquement imposé contre les seconds slovènes et belges. Mais c’est en demi-finale que les choses se sont gâtées, lorsqu’il s’est d’abord incliné de justesse contre Mattias Falck (n°20). La défaite face à Möregårdh en match 4, elle aussi, peut être rageante tellement elle semblait proche. “Évidemment, on est déçu. Des vrais regrets ? Pas tant que ça. Il n’y a eu que des matchs de haut niveau. Là, c’est de la déception parce qu’ils ont tous fait des gros matchs. J’ai une pensée pour Alex… Il perd deux fois 3 sets à 2”, conclut le sélectionneur Nathanaël Molin au micro de la FFTT.
À noter qu’en l’absence de Simon Gauzy – qui a connu la naissance de son deuxième enfant – c’est Can Akkuzu qui a suppléé les frères Lebrun, dans un premier temps. À partir des quarts de finale, le Breton Jules Rolland a évolué en tant que troisième homme. Encore trop tendre, il n’a pas su remporter ses matchs, qui auraient pu être décisifs.
Il aura donc manqué à cette équipe de France un soutien plus solide derrière Félix Lebrun. Son frère a parfois été trop tendu et cela s’est largement ressenti. Can Akkuzu et Jules Rolland n’auront, quant à eux, pas fait oublier Simon Gauzy, dont l’absence a été préjudiciable. Mais encore une fois, ces Bleus ont un potentiel hors du commun.
Bernadette Szőcs, une muraille infranchissable

Vainqueure de l’Autriche puis de la Slovaquie, l’équipe de France féminine est une nouvelle fois parvenue à assurer la médaille de bronze aux Europes. Une deuxième de suite après celle de 2021 en Roumanie, à Cluj. Et justement, ce sont les Roumaines qui se sont frottées aux Bleues en demi-finale de la compétition… Comme en 2021 ! Encore une fois, la marche aura été trop haute pour ces Bleues, incapables de se débarrasser de la leader roumaine Bernadette Szőcs.
Prithika Pavade fut la première à s’y frotter et de très belle manière. Grâce à son service en pivot, la jeune française de 19 ans a considérablement gêné son adversaire. Surtout dans le premier set, que la Roumaine a pourtant remporté de justesse (9-11). Avant de dérouler dans le second (6-11). Menée 1-4 dans la troisième manche – moment choisi par Ludovic Rémy pour prendre le temps mort – Prithika Pavade ne sait pas laissé faire (13-11). Pas suffisant pour inquiéter “Bernie”, qui rapportait ainsi le premier point à sa sélection (7-11).
Tombeuse de la n°2 roumaine, Jia Nan Yuan s’est elle aussi confrontée à la n°10 mondiale. Très vite menée 2 sets à 0 (8-11/8-11), la Française a pourtant mis le doute à son adversaire. En effet, elle lui prenait la troisième manche, avant d’effectuer une “mini-remontada” dans la quatrième. À 10-6 en faveur de la Roumaine, Jia Nan est revenue à 10-10, avant de céder (10-12). “Je pense qu’on aurait pu faire mieux sur la réalisation. On a fait un match normal. Pour aller chercher la Roumanie, il faut savoir élever son niveau de jeu. Ce qu’on n’a pas vraiment su faire”, regrette Ludovic Rémy, le sélectionneur des Bleues, au micro de la FFTT.
Zarif, Pavade, Lutz : une jeunesse rafraîchissante

Affirmée en doublure de Jian Nan, la jeune Prithika Pavade s’est une nouvelle fois montrée à la hauteur. En remportant ses matchs de poules et son huitième de finale contre l’Autrichienne Karoline Mischek (3-0), Pavade a été solide. Malheureusement, elle s’est inclinée face à Barbora Balazova, sa coéquipière en club à Saint-Denis (2-3). Son jeu toujours aussi offensif est encore et toujours plaisant à regarder.
À l’instar de sa coéquipière Audrey Zarif (n°73), qui a été précieuse dans cette accession au podium. En respectant son rang contre Anastasia Sterner (n°430, 3-1) et en perfant contre Tatiana Kukulkova (n°58, 3-1), la championne de France 2023 a pleinement convaincu. Évidemment, sa défaite contre la Roumaine Adina Diaconu (n°74, 1-3) fait tâche, mais sa compétition présage du positif. “On est très contentes de notre parcours. On sent plus de stabilité, mais on voulait aller plus loin. J’espère que ce sera pour une prochaine fois”, relativise-t-elle. D’autant que derrière, les deux sœurs Lutz (Charlotte et Camille) ont également une progression fulgurante. Elles seront amenées, sans aucun doute, à porter l’équipe de France dans les mois et années à venir.
Nul doute que ces équipes de France ont de belles années devant elles, même si les têtes sont déjà tournées vers les prochaines échéances. Et notamment les Mondiaux 2024 par équipes, à Busan (Corée du Sud).