Depuis leur sacre olympique à Tokyo en août 2021, de l’eau a coulé sous les ponts. Après avoir fait rêver des millions de Français, les Bleus poursuivent un autre rêve : leur premier titre de champions du monde. Le tout dès aujourd’hui, à Ljubljana. Retour sur un an de peines, de changements et de joies.
L’APRÈS LAURENT TILLIE, UNE PROMESSE GÂCHÉE

Bien avant les Jeux Olympiques de Tokyo en août 2021, une nouvelle tombe : ce sera la dernière compétition de l’emblématique sélectionneur Laurent Tillie. En effet, après neuf années de bons et loyaux services, Tillie et la « Team Yavbou » sont arrivés au bout d’un cycle. Se pose alors la question de son remplacement, avec en ligne de mire le grand rendez-vous pour les équipes françaises : les JO de Paris 2024, à domicile. Pour cela, la Fédération française de Volley-ball (FFVB) ne fait pas les choses à moitié et parvient à s’attacher les services de celui qui est souvent considéré comme le plus grand entraîneur de tous les temps. Le Brésilien de 63 ans, Bernardo Rezende (dit Bernardinho), entre autre quadruple finaliste olympique et deux fois titré avec la Seleçao (2004 et 2016). L’Auriverde compte quarante-cinq médailles dont trente titres. Le plus beau palmarès du monde. Sa nomination fait alors l’unanimité au sein des joueurs comme des suiveurs du volleyball, une belle promesse.
Les Bleus de Tillie ont illuminé la planète volley en devenant pour la première fois champions olympiques dans un scénario de dingue contre le Comité Olympique Russe, avec une victoire en cinq sets suivie par plus de 7 millions de téléspectateurs. Le volley français est alors à son apogée et l’ère Laurent Tillie se clôt avec un bilan en termes de titres que l’on pourrait qualifier de mitigé. Le technicien français se sera surtout attelé à la tâche de former un collectif. Mission accomplie. Son successeur aura l’occasion de travailler avec un groupe talentueux, soudé, dans lequel les générations et les qualités se mélangent pour former une équipe magnifique.

La page tokyoïte refermée, le moment de la transition se présente. L’occasion pour Bernardinho de prendre les rênes de l’équipe pour la préparer à disputer les Championnats d’Europe et ainsi remobiliser les champions olympiques. Deux matchs amicaux remportés contre l’Ukraine pour les premières de Bernardinho et les Bleus se sont envolés pour l’Estonie et l’Euro avec comme objectif de confirmer leur statut. La phase de groupes se déroule parfaitement avec cinq victoires en cinq rencontres et seulement un set de concédé contre l’équipe d’Allemagne. Vient la phase finale et le match en huitièmes de finale face à la République Tchèque. Éreintés, les Français ne parviennent pas à tenir le rythme et s’inclinent sur un score sec de trois sets à zéro. Après un été international aussi agité, l’Euro 2021 était sans nul doute la compétition de trop.
Le coup de tonnerre de l’ère Bernardinho n’est pas cette élimination qui, elle, était attendue, mais bien sa démission pour raisons personnelles fin mars 2022. Décision qu’il qualifie de « plus difficile de sa vie », il accordera un entretien dans les colonnes du journal L’Équipe quelques jours plus tard. « Depuis mon divorce, la situation est un peu difficile avec mes deux filles. La plus petite (12 ans) a souffert de la séparation. (…) Je me serais senti égoïste si j’avais privilégié ce projet professionnel. (…) Dans la vie, il faut respecter un ordre : la santé, la famille et le travail », détaille-t-il avec regret au journaliste. La belle promesse de sa nomination un an plus tôt est gâchée, mais l’Équipe de France regarde devant elle et va devoir lui trouver un successeur.
ANDREA GIANI, COMME UNE ÉVIDENCE

Déjà sur la shortlist au moment de désigner le successeur de Laurent Tillie, celui qui était sélectionneur de l’Allemagne jusqu’au moment où la FFVB est venue le chercher, se détachait comme le choix numéro un après le départ du Brésilien. C’est d’ailleurs le nom qui a été soufflé par Bernardinho lui-même au moment de son départ, soucieux de soigner sa sortie et de venir en aide à sa fédération. Andrea Giani, 51 ans, qui possède un palmarès impressionnant en tant que joueur, qui est technicien des meilleures équipes d’Italie et qui se démarque comme un entraîneur aguerri, devient le nouveau sélectionneur de l’équipe de France. Ce choix paraît sensé, tant le parcours de Giani en tant que sélectionneur est logique et crescendo pour devenir le patron des champions olympiques 2020. Le principal chantier ciblé par l’impressionnant italien (1 m 96)sera la constance des Bleus, comme il l’évoquait dans une interview accordée à L’Équipe en avril, à la suite de sa nomination. « Dans le passé, l’équipe de France a toujours évolué à un haut niveau. Mais a parfois manqué de constance », cible-t-il.
Le coach d’Earvin Ngapeth à Modène, la star des Bleus, a alors la lourde tâche d’emmener les Français pour disputer la Ligue des Nations au Japon et aux Philippines, en juin, et a, tout comme son prédécesseur, Paris 2024 en objectif ultime, afin d’y réaliser le doublé. Les Tricolores réalisent une campagne sérieuse et appliquée, mais imparfaite (9 victoires en 12 matchs), qui les verra finir à la quatrième place du classement seulement derrière l’Italie, la Pologne et les États-Unis. Cette performance est synonyme de qualification au Final 8, qui s’est déroulé fin juillet à Bologne.

En ¼ de finale, les Français sont opposés au Japon dont ils se défont facilement, tout comme l’Italie qu’ils étrillent, alors qu’ils sont en terre transalpine (3-0). La finale sera une autre paire de manches, puisque les Bleus y affrontent les États-Unis et prennent un départ canon en menant très rapidement deux sets à zéro. Face au réveil des Américains, les Bleus se font peur et sont rejoints au score par des Américains survoltés. Ils s’imposent au cinquième set pour valider le premier titre de l’ère Giani. Après 2015 et 2017, c’est la troisième Ligue Mondiale remportée par les Tricolores. Avec un Antoine Brizard très inspiré, un Jean Patry toujours juste et Earvin Ngapeth élu meilleur joueur du tournoi, tous les voyants sont au vert avant de disputer les Championnats du Monde.
Dès le 4 août, les Français se sont retrouvés pour un stage de préparation d’une dizaine de jours au CREPS de Talence. En travaillant dans une ambiance studieuse, l’équipe se prépare et est concernée à l’aube de son plus grand défi : devenir championne du monde pour la première fois de l’histoire de l’Équipe de France. En battant facilement le Brésil en match de préparation, les Bleus ont assuré et envoyé un message fort à leurs adversaires en phase de groupes dont ils devraient pouvoir disposer facilement.
QUI POUR BARRER LA ROUTE DU TITRE AUX BLEUS ?

Les Bleus ont comme meilleur résultat aux Mondiaux une médaille de bronze, lors de l’édition 2002. Vingt ans plus tard, forts de leur titre olympique et de leur titre en Ligue des Nations, ils s’avancent en favoris de la compétition qui aura lieu en Slovénie et en Pologne. Membres du groupe D, les Français disputeront l’intégralité de leur match à l’Arena Stožice de Ljubljana, avant de s’exporter en Pologne pour la phase finale. Les deux pays ont été choisis en remplacement de l’Ukraine et de la Russie, à la suite de la guerre opposant ces nations, initialement prévues pour accueillir la compétition.
Dans leur groupe, les Tricolores devront se méfier de la Slovénie ainsi que de l’Allemagne, adversaires les plus dangereux si l’on se réfère au classement mondial des nations, même s’ils n’ont pas l’habitude de battre la France (respectivement 10e et 15e). Giani connaît bien ces deux équipes puisqu’il les a toutes les deux entraînées (la Slovénie entre 2015 et 2016, et l’Allemagne puisque c’est son poste précédant l’Équipe de France). Nul doute qu’il saura tirer profit de cet avantage pour identifier les faiblesses de ses adversaires. Le Cameroun, dernière nation de ce groupe, fait figure de petit poucet. Ce sera l’occasion pour eux d’affronter pour la première fois de leur histoire l’Équipe de France.
Tout au long de la phase finale, les Bleus se frotteront à des nations forcément meilleures avec la Pologne, qui évoluera à domicile, et les Italiens, champions d’Europe en titre. À surveiller également, les Américains, ainsi que les Argentins habitués, à bien performer sur ce genre de compétitions. Quoiqu’il en soit, la route vers le titre mondial qui échappe depuis toujours à la France sera piégeuse et sinueuse. Attention à bien négocier les virages et à foncer vers Katowice pour la consécration le 11 septembre !
Crédits photos : Équipes de France Volley